Pour valoriser ses terres les plus ingrates, Simon Bransard a réintroduit des vaches en Champagne berrichonne. Rencontre avec le gagnant de Graines d’agriculteurs 2017 (prix du public).
Et si l’avenir des zones céréalières, c’était d’y réintroduire de l’élevage ? C’est le pari de Simon Bransard, installé depuis 2013 à Saint-Germain-des-Bois (Cher). Depuis plusieurs dizaines d’années, vaches et moutons avaient déserté le vaste plateau calcaire de la Champagne berrichonne, chassés par les grandes cultures. Alors que partout en France, l’élevage perd du terrain, Simon a démarré un atelier de 25 vaches allaitantes en mars 2017. Un projet qui lui permet de conjuguer passion des bêtes et efficacité économique. Car son objectif était avant tout de valoriser ses terres à faible potentiel ou à fort risque climatique. « On n’a aucune rentabilité sur des parcelles où on sort 50 qx/ha avec d’importantes charges opérationnelles », tranche l’agriculteur de 27 ans. Il a donc converti en herbe 70 ha de zones humides et de terres superficielles. « Ces parcelles plombaient la rentabilité moyenne de l’exploitation », affirme-t-il. Un diagnostic qu’il a confirmé en calculant son coût de production avec l’outil JA’ffine, créé par JA du Cher.
Un projet au pas de course. « Les systèmes céréaliers purs à rotation courte vont rapidement arriver dans une impasse », estime le jeune éleveur. Attaques d’insectes, pression des adventices, prix dépendants des marchés mondiaux l’ont poussé à se diversifier. Les récoltes catastrophiques de 2016 ont servi de déclencheur. À l’époque, Simon et son père Jean-Philippe avaient chacun leur propre exploitation : 93 ha en individuel pour le fils, 260 ha en EARL pour le père. Après plusieurs années de difficultés, ils regroupent leurs fermes et créent le Gaec de Rouffeux début 2017. « Au début, mon père était sceptique, raconte le jeune polyculteur. Mais il ne m’a pas arrêté. » Simon a mené son projet au pas de course : accord bancaire en septembre 2016, début des travaux en novembre, livraison du bâtiment en mars 2017… juste à temps pour l’arrivée du troupeau, constitué de 25 mères charolaises et de leur suite.
Doublement du nombre de cultures. Les mâles sont vendus en broutards, les bonnes génisses sont engraissées et les moins bonnes partent en « babynettes » (jeunes femelles conduites comme des taurillons). Simon valorise aussi quelques bêtes en vente directe. Mais quelle que soit leur destination, tous les animaux mangent local. Ensilage de luzerne, foin, céréales et pois : « Nous produisons 99 % de la ration », se félicite Simon. Pour y parvenir, les deux agriculteurs ont doublé le nombre de leurs cultures en introduisant de l’orge brassicole, de la luzerne semence, du pois, du lin graine et des lentilles. D’où un allongement des rotations, entre six et huit ans contre trois auparavant. Simon mise sur cette diversification pour réduire ses traitements phytos, tout en ayant des champs plus propres et moins de mauvaises herbes résistantes. Le fumier des bovins permet de limiter les apports d’engrais minéraux.
Passionné d’élevage et d’énergies renouvelables. Attentif à l’environnement, le polyculteur-éleveur espère contractualiser une Mesure agro-environnementale (MAE) pour ses terres situées en zone Natura 2000. Début 2016, il a installé des panneaux photovoltaïques sur son bâtiment de stockage (800 m² au sol). Un revenu complémentaire qui « paie l’annuité du bâtiment ». Son bâtiment d’élevage a été conçu pour accueillir lui aussi des panneaux solaires.
Simon se donne cinq ans pour réorganiser l’exploitation, avec l’objectif que la partie élevage représente 40% de son chiffre d’affaires. D’ici là, le jeune passionné ne s’interdit pas de tester des nouvelles cultures (épeautre, lupin) et de nouvelles conduites d’élevage (taurillons), avant d’envisager des projets de plus grande ampleur. Son rêve : se lancer dans un projet collectif de méthanisation.
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