À l’Écurie seconde chance, les chevaux de course réformés sont reconvertis pour l’équitation classique. Rencontre avec Amélie et Sylvain Martin, les créateurs de ce concept innovant et éthique.
Que devient un cheval de course… après la course ? Jusqu’à présent, c’était surtout la réforme qui attendait les animaux en fin de carrière, blessés ou pas assez performants. Mais ça, c’était avant l’Écurie seconde chance. En 2009, Sylvain Martin a créé cette écurie d’un nouveau genre, spécialisée dans la reconversion professionnelle des chevaux de course. Une idée que ce jockey amateur a mûrie en fréquentant le milieu des courses. « Il n’existait que des initiatives isolées ou des associations, mais pas de programme à grande échelle, explique sa femme Amélie, qui l’a rejoint en 2013. Nous avons fait le choix de travailler avec des professionnels.» En comptant les deux associés, leur entreprise fait aujourd’hui vivre sept personnes. En 2016, 250 chevaux sont passés par l’Écurie seconde chance, à Combrée (Maine-et-Loire), en plein pays de l’équitation. Ils étaient 30 en 2009.
« Faire baisser la pression ». Après avoir été contacté par des entraîneurs, des éleveurs ou des propriétaires, c’est Sylvain qui sélectionne et va chercher les chevaux. « Il est important de bien connaître chaque cheval, son passé physique et moral, explique Amélie. Ainsi, quand il arrive chez nous, nous savons s’il a besoin de repos ou d’être monté.» Chaque coursier a droit à un programme personnalisé, qui correspond aussi aux différents débouchés de l’Écurie seconde chance.
Pour accueillir un nouveau pensionnaire, l’équipe travaille sur trois points. D’abord le changement d’environnement. « Avant d’arriver, ils ont souvent vécu en box, poursuit la passionnée d’équitation. Ici, nous avons 32 ha de prairies. Ils sont tout le temps au pré, dans un paddock individuel, avec une couverture l’hiver. » L’alimentation, ensuite : une ration riche en cellulose avec foin à volonté (au lieu de l’avoine qui fait le quotidien des chevaux de course). Et enfin, le travail. « À cause de leur génétique et leur entraînement, ce sont des animaux qui ont beaucoup d’énergie. Nous les faisons baisser en pression, nous leur apprenons à prendre leur temps, à décomposer leurs mouvements. » Un travail de fond qui passe par du travail à pied, des assouplissements, des promenades en extérieur, quelques petits obstacles, etc.
Un cheval reste en moyenne un mois et demi à l’Écurie seconde chance. Son départ vers une nouvelle vie est une étape clé, au-delà une transaction commerciale. « Chaque jour, nous recevons 50 appels de gens intéressés par nos chevaux.» Une clientèle attirée par le tarif modique des animaux, mais que l’écurie sélectionne drastiquement. « Le cheval aura-t-il un cadre de vie adapté ? Quel est le niveau d’équitation de son propriétaire ? Le montera-t-il régulièrement?»
Sélection des clients. Avant même de venir essayer un cheval, les clients potentiels sont déjà triés. « Ils doivent accepter une part de risque et surtout être dans le même état d’esprit que nous: ils ne viennent pas chez nous pour consommer du cheval.» Par contrat, les clients s’engagent à offrir des conditions de vie correctes à leur cheval, à ne jamais l’envoyer à l’abattoir, à ne pas participer à des courses hippiques. Autant de devoirs qui seront même transmis en cas de future revente de l’animal.
Autre obligation des clients : celle d’une traçabilité à vie. « La filière courses nous fait confiance. Si l’ancien propriétaire d’un cheval nous appelle, nous devons être capables de lui dire où est parti son coursier. » Les clients sont même tenus d’envoyer des photos et des nouvelles de leur cheval acheté à l’Écurie. Et elles sont souvent réjouissantes. Après les courses, les anciens pensionnaires s’illustrent dans d’autres disciplines, comme le concours complet, le polocrosse, le horse ball ou encore le dressage. Amélie aime ainsi raconter l’histoire spectaculaire de sa « mascotte», Charvico. Vendu à une cavalière amatrice, il est devenu « l’inverse du stéréotype du cheval de course», monté sans mors, et capable de faire la révérence. Amélie, qui travaillait dans la communication pour l’agroalimentaire, connaît l’importance du web et des réseaux sociaux. Une salariée de l’Écurie seconde chance s’y consacre à plein temps.
Leur page Facebook compte 45 000 abonnés. Une preuve de l’intérêt pour cette démarche éthique.
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