A quelques moments d’un accord potentiel sur le cadre financier pluriannuel, les dirigeants européens doivent avoir en ligne de mire les vrais enjeux pour l’agriculture, ceux auxquels nous, agriculteurs, devrons faire face. D’abord le défi démographique sans précédent pour la profession. Seuls 6,5 % des agriculteurs européens ont moins de 35 ans ! Près de la moitié d’entre nous partira à la retraite dans six à sept ans.
Ensuite le revenu. La diminution du nombre d’agriculteurs n’a pas conduit à une amélioration du partage de la valeur. Comment attirer dans le métier, investir et récompenser les efforts fournis sans une rémunération au moins décente ?
Enfin la transition écologique de l’agriculture face au défi climatique qui doit se faire en faveur de plus de résilience et de respect de l’environnement, sans oublier l’intérêt de l’agriculteur.
Pour un projet européen véritablement commun
Parce que l’agriculture a besoin d’une Europe forte et ambitieuse, proche de ses citoyens, harmonisée et solidaire, Jeunes Agriculteurs se place plus que jamais en tête de peloton pour porter un projet structurant pour l’Europe et son agriculture. Pour répondre à l’ensemble des défis auxquels nous sommes confrontés, il faut lui redonner du sens, un sens qui passe notamment par un véritable projet agricole. Malheureusement, les propositions formulées par la Commission européenne depuis juin 2018 sont loin d’illustrer ce projet que JA appelle de ses vœux.
La Commission s’est malheureusement désengagée d’une vraie politique agricole européenne en renforçant la subsidiarité, en reléguant les orientations budgétaires aux échelons nationaux et régionaux. L’issue probable :une divergence accrue des politiques nationales, qui provoquera un renforcement des distorsions de concurrence. Ceci fait prendre le risque de voir, non pas une politique européenne commune mais DES politiques nationales.
Pour un budget à la hauteur des enjeux
On doit donc déplorer un manque d’ambition flagrant sur l’aspect budgétaire. Brexit, tensions internationales, dérèglement climatique… l’Europe fait face à de nouveaux défis qu’elle doit être en capacité de relever.
Ce serait une erreur de laisse le secteur agricole en payer les frais. Une baisse des soutiens aux agriculteurs est un risque de les voir disparaitre, notre souveraineté alimentaire avec eux ! Le budget représente aujourd’hui plus de 360 milliards d’euros. Environ 38 centimes par Français, c’est un investissement limité pour garantir des territoires ruraux vivants, une alimentation de qualité et sûre, la préservation des savoir-faire culinaires et agricoles et le renouvellement des générations. Il est inquiétant de voir qu’en faisant des propositions de diminution de plusieurs milliards, certains à l’Union européenne mette l’avenir de l’agriculture en danger.
Les Etats membres doivent plutôt renforcer leur contribution et l’Union européenne doit trouver de nouvelles sources de financement. C’est le prix à payer pour que le secteur agricole soit à la hauteur des défis actuels.
Pour une agriculture européenne rajeunie
Pour la première fois dans l’histoire de la Pac, la Commission Européenne affiche le renouvellement des générations d’agriculteurs dans les objectifs de la Pac.
Cet objectif inédit est une victoire pour nous, mais montre aussi la taille de l’enjeu. Nous devons donc transformer l’essai par des mesures concrètes :
- un budget sanctuarisé d’au moins 4% de la Pac à mobiliser sur les outils du premier et du second pilier ;
- un budget qui doit être capable d’augmenter pour s’adapter aux besoins réels;
- une stratégie nationale forte en faveur du renouvellement des générations en agriculture.
Ces propositions concrètes doivent s’accompagner d’une refonte des outils de la Pac qui ont prouvé leurs limites dans la sécurisation du revenu des agriculteurs, dans la prévention et la gestion des risques, dans la préservation de l’environnement et enfin dans le renouvellement des générations d’agriculteurs.
Nous appelons les dirigeants européens à voter pour un budget renforcé au service d’un projet ambitieux, à la hauteur des enjeux, qui doit se concentrer sur les fondamentaux d’une Pac qui soutienne des filières durables. Ces fondamentaux, sont en premier lieu le maintien d’agriculteurs nombreux et le développement d’exploitations de type familial, viables, vivables et transmissibles sur tous les territoires.
Ensuite, l’orientation des filières vers davantage de création et de partage de valeur mais aussi la sécurisation du revenu des agriculteurs face aux aléas climatiques, sanitaires, environnementaux et économiques.
C’est enfin un nouveau pacte alimentaire avec les citoyens européens préservant la sécurité alimentaire, prenant en compte les ressources naturelles, et maitrisant les impacts environnementaux de l’agriculture.
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