J’aurais pu vous parler de l’actualité mouvementée du moment et notamment des gilets jaunes, mais j’ai préféré dans ce flot d’informations évoquer un tout autre sujet pas assez abordé à mon goût et qui a pourtant toujours mobilisé Jeunes Agriculteurs : le développement d’une agriculture viable, vivable et transmissible partout dans le monde.
La semaine prochaine se tiendra le congrès du Réseau des Organisations Paysannes et des Producteurs Agricoles de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA) du 1er au 3 décembre auquel je me rendrai dès vendredi 30 novembre en Gambie pour échanger avec les paysans africains. C’est un rendez-vous, qui a lieu quelques mois avant de nous réunir du 15 au 17 avril 2019 à Paris pour le Sommet International des Jeunes Agriculteurs. En 2014, ce sommet que nous avions organisé avec Agriculteurs Français et Développement International (AFDI) avait réuni plus de 40 délégations étrangères. Nous réitérons l’évènement sous une forme un peu différente, pour remettre au centre du débat ce qui nous semble répondre aux enjeux critiques du moment : préserver une agriculture familiale et permettre une meilleure reconnaissance du métier d’agriculteur.
Alors que les agriculteurs familiaux représentent 40% de la population active mondiale, l’avenir du métier est préoccupant : concurrence, aval des filières, exode rural, désertification des territoires, non reconnaissance du métier. La liste des obstacles est longue et balaie autant les États-Unis que le Burkina-Faso.
Dans ce contexte global, comment pouvons-nous dessiner un avenir prometteur pour les agriculteurs de demain ?
Dans tous les pays du monde, l’agriculture et ses agriculteurs sont soumis à des pressions communes : accès au foncier, accès aux ressources naturelles, commercialisation, structuration des filières, financement des projets. Devant des problématiques communes, notre travail est de partager et faire partager nos solutions. C’est notre devoir d’échanger et de dialoguer entre paysans du monde. Nous sommes les détenteurs des solutions et devons pousser nos gouvernements respectifs à saisir l’impératif d’accompagnement et de structuration de la filière agricole dont nos jeunes ont besoin pour répondre aux enjeux alimentaires de demain.
C’est un fait, les agriculteurs font face à un paradoxe entre les conséquences de la concurrence de l’agriculture mondialisée et les fortes demandes de nos citoyens pour une alimentation locale et de qualité. Nous pensons, pour relever ce défi, que l’agriculture familiale est une des réponses à apporter et que nous devons défendre un modèle agricole où les femmes et les hommes sont maîtres de leurs décisions, à la fois à la tête du capital, des décisions et des pratiques. C’est par le développement d’une agriculture adaptable et résiliente que nous pourrons nous adapter au changement climatique et produire une alimentation durable. L’agriculture doit être une des réponses communes au réchauffement climatique et non l’éternel coupable injustement pointée du doigt !
Devant l’ampleur de la crise alimentaire, la réponse se joue aussi au niveau de nos organisations internationales. Pourquoi l’agriculture et l’alimentation sont-ils traités par l’OMC au même titre que des sujets de défense ? Arrêtons d’échanger nos avions de chasse contre des kilos de viande ! La denrée alimentaire n’est pas une matière première à troquer contre n’importe quoi. Elle doit sortir de l’OMC. Cette nouvelle logique empêchera de faire des accords de libre-échange une pente vers la baisse de qualité de notre alimentation, pour préférer une construction économique commune.
Voilà, la réponse : de l’humain et du vivant. Pour des campagnes vivantes, des paysages diversifiés, une alimentation locale et de qualité, il n’y a pas d’autres solutions que de maintenir des agriculteurs nombreux sur le territoire et de leur octroyer un revenu décent et stable. Aider les agriculteurs en diffusant mieux les informations propices au changement et en mettant en place des dispositifs d’accompagnement structurés pour tous les modèles agricoles. C’est ce que nous demandons aux Gouvernements du monde de faire, autant pour leur croissance que pour l’émancipation des individus.
S’il y a bien une évidence qu’il faut sans cesse rappeler, c’est que ce sont les jeunes qui sont l’avenir de l’agriculture dans le monde, que ces nouvelles générations doivent être encouragées et reconnues et comme le disait Edgard Pisani : « nous aurons besoin de toutes les agricultures du monde pour nourrir le monde. »
Alors que ce soit pour votre assiette ou votre campagne, qu’attendez-vous pour vous saisir du sujet ?
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