Faisons de la crise agricole une opportunité

La création de l’Union européenne, puis de sa politique agricole commune, visait à financer une agriculture capable de nourrir tout le continent. L’adoption des lois Pisani avait rallié la jeunesse paysanne pour refonder le modèle agricole français. La révision de la Pac en 1992 mettait fin aux prix garantis pour rééquilibrer un marché en danger. Ces décisions politiques structurantes du passé montrent que les crises sont souvent l’occasion de réformer profondément l’agriculture.

La crise d’aujourd’hui est bien plus complexe que le risque de famine. Elle découle d’enjeux qui s’imbriquent, en particulier d’une démographie agricole en chute libre, d’un changement climatique qui s’accentue, de territoires en grande détresse économique et d’une surproduction de normes qui rendent illisibles voire incohérente la réglementation. Le tout sur fond de défiance envers nos politiques. L’agriculture se sent affaiblie par l’impératif écologique et climatique alors qu’elle devrait être propulsée sur le devant de la scène.

Les mobilisations de cet hiver ont montré qu’un sursaut syndical était encore possible et qu’une colère profonde (mais responsable dans ses actes) du terrain pouvait encore être salvatrice. Les agriculteurs de France, voire de toute l’Europe, ont demandé un changement de logiciel pour une agriculture nourricière, résiliente, vertueuse et rémunératrice par des actes politiques concrets, et non pas par des réglementations fumeuses et déconnectées de nos métiers.

Pour y répondre, nous avons mis sur la table de nombreuses pistes d’action précises lors de nos échanges avec le Gouvernement. Un certain nombre de signaux sont au vert et il faut les saisir. Gouvernement, Europe, parlementaires, collectivités, entreprises, agriculteurs… que chacun prenne ses responsabilités !

Certes, la situation face au changement climatique va demander de la lucidité pour transformer nos fermes, et parfois même du courage pour accompagner les agriculteurs les plus en difficulté à quitter le métier avant d’en arriver à des situations dramatiques. Mais je crois que rien n’est perdu et que nous sommes aussi dans un moment où nous pouvons tourner une nouvelle page de notre agriculture. En prenant des décisions courageuses et en donnant des perspectives aux jeunes, nous pourrons faire de la crise agricole une opportunité et faire date. C’est en ce sens que nous œuvrons pour la mise en place d’un « contrat d’avenir agricole » pour engager les agriculteurs, et l’ensemble des parties prenantes, dans un contrat qui viserait à accompagner les transitions nécessaires pour la ferme France.

Le président de la République devra aller dans le sens de cet optimisme dans une expression publique à venir que j’attends avec impatience, et exigence.


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