L’Assemblée nationale a adopté en première lecture la proposition de loi du député Jean-Bernard Sempastous portant mesures d’urgence pour assurer la régulation de l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires, le 26 mars dernier.
Jeunes Agriculteurs se félicite de l’adoption de ce texte qui doit désormais être examiné par le Sénat afin d’entrer vigueur.
Pour rappel cette proposition de loi vise à favoriser l’installation d’agriculteurs, la consolidation d’exploitations et le renouvellement des générations agricoles en luttant contre la concentration excessive des terres et l’accaparement. Son champ d’application porte tant sur le droit d’exploiter que sur le droit de propriété. C’est un dispositif autonome qui fonctionne en parallèle du contrôle des structures et du droit de préemption des SAFER.
Mais pourquoi une telle loi ?
Si l’installation en agriculture est active, il est nécessaire que le nombre de nouveaux installés augmente. L’enjeu est donc de prévoir les conditions nécessaires à l’installation, au cœur desquelles l’accès au foncier est primordial.
En effet entre 2010 et 2016, le recul du nombre d’exploitations agricoles se poursuit : -1,9% par an entre 2010 et 2016. Le ministère de l’Agriculture indiquait en 2019 que 130 000 chefs d’exploitation ont aujourd’hui plus de 55 ans et seront donc en âge de partir à la retraite dans quelques années.
Cette donnée doit se croiser avec l’enjeu du foncier agricole, car ces 130 000 producteurs détiennent ¼ de la surface agricole utile et deux tiers d’entre eux n’ont pas encore de repreneur !
Il est donc urgent de favoriser le renouvellement des générations. Or l’installation devient difficile pour les jeunes du fait de l’accaparement du foncier et de la concentration des exploitations pouvant atteindre une taille excessive et pénaliser la transmission à des jeunes. Ces phénomènes conduisent également à une baisse de la valeur ajoutée, une simplification des systèmes de production à moindre valeur ajoutée et globalement une perte de vitalité et de valeur sur les territoires (emplois, services, produits…).
Le développement de l’accès au foncier à travers le marché sociétaire encourage cet état de fait. Si elles peuvent permettre une gestion optimisée de l’exploitation et une transmission progressive, les sociétés sont malheureusement de plus en plus souvent utilisées pour s’affranchir des règles. Les sociétés exploitent désormais en France près des deux tiers de la surface agricole utile et le marché sociétaire représente l’équivalent du cinquième de la valeur du marché foncier. Pourtant, le développement du marché sociétaire demeure un angle mort de la régulation du foncier agricole puisqu’il échappe à l’intervention des Safer et du contrôle des structures.
Le mécanisme de contrôle prévu par la future loi Sempastous : quelques explications techniques
Pour lutter contre ce phénomène, la proposition de loi instaure un contrôle administratif des prises de participation dans une société exploitant des immeubles à usage ou à vocation agricole au profit d’un bénéficiaire exploitant ou non ; personne physique ou morale qui :
D’une part, détient déjà, directement ou indirectement, en propriété ou en jouissance, des biens fonciers agricoles dont la superficie totale excède le seuil d’agrandissement significatif. Ce seuil est fixé par le préfet de région, entre 1 fois et 3 fois la surface agricole utile régionale moyenne fixée dans le schéma directeur régional des exploitations agricoles.
Et d’autre part, acquiert du fait de la prise de participation le contrôle de la société ou le renforce lorsqu’il l’a déjà antérieurement à la prise de participation.
Le contrôle administratif s’exerce aussi pour toute modification de la répartition du capital social ou des droits de vote aboutissant à transférer le contrôle de la société à un nouveau bénéficiaire qui détient en propriété ou en jouissance des biens dont la superficie totale excède le seuil d’agrandissement significatif.
Cette loi utile en attendant une grande loi foncière doit maintenant être adoptée par les Sénateurs : l’attente de Jeunes Agriculteurs est très forte pour voir ces derniers s’en saisir !
En savoir plus : la fiche sur la politique liée au foncier de notre manifeste pour la souveraineté alimentaire.
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