Les extrémismes hurlent, nous avons besoin d’écoute

Ces dernières semaines ont été marquées par une escalade de violence vis-à-vis de la profession, en particulier des éleveurs, des actes et des propos intolérables que nous avons condamnés au sein d’une lettre ouverte au président de la République. Ce nouvel épisode d’attaques entretient un climat de violence délétère dans notre société et cible directement nos savoir-faire.  Les remises en causes de nos pratiques, d’une façon générale, que ce soit dans l’élevage ou les productions végétales, sont non seulement récurrentes mais nous apparaissent de plus en plus radicales. Elles nous mettent mal à l’aise.

Pour certains, leurs combats, leurs causes, justifient tous les moyens, mais doit-on forcément agir les uns contre les autres ? Est-ce que cela nous fait avancer ? Je ne pense pas.

Notre société doit évoluer et se réinventer, cette responsabilité repose sur chacun d’entre nous au quotidien. Mais cela implique également de ne pas passer à côté de la réalité du terrain agricole ou d’agir en totale méconnaissance des territoires, des acteurs et de leurs enjeux. Nous devons sans doute tous faire évoluer nos habitudes mais nous ne devons pas nous nous laisser entrainer dans de mauvaises batailles! Se montrer du doigt ou s’accuser les uns les autres ne produit rien, il s’agit de construire des solutions de long terme. Se laisser aller à la surenchère médiatique sur des propositions inapplicables ne va dans le sens que de ceux qui vivent de ces problèmes et ne souhaitent pas vraiment les résoudre.

Il faut aussi rester dans la réalité. On sent souvent un appel, présenté comme innovant, à un retour vers d’anciennes pratiques, vers une certaine « naturalité » voire vers le sauvage. Je ne veux pas fermer les yeux sur cette aspiration, même si elle me parait parfois relever du fantasme, mais si nous évoluons, si nous innovons, ça ne peut pas être sans prise en compte des enjeux économiques, sociaux et environnementaux.

Ce constat nous devons le partager, mais surtout nous devons le faire ensemble avec de vrais moyens pour affronter les défis climatiques, environnementaux, sanitaires qui se dressent devant nous. J’espère que c’est une mission que prend à cœur ce gouvernement en partie renouvelé que de recréer du lien et de rééquilibrer les interventions des différentes parties prenantes pour ne pas laisser certaines prendre le pas sur d’autres. Toutes les voix doivent être entendues.

Didier Guillaume, notre nouveau ministre de l’agriculture a mis l’accent, lors de son discours de passation sur les jeunes et la formation agricole. Nous l’encourageons à se saisir du renouvellement des générations en agriculture, pour que nous gardions des jeunes sur le territoire et un métier attractif.

Car nos agriculteurs sont une force vive de nos territoires, les initiatives sociales, environnementales et économiques fleurissent dans nos cours de ferme pour animer, développer nos territoires. Nous travaillons chaque jour à répondre aux exigences de la société afin de produire des aliments de qualité qui font notre richesse et notre fierté. Bien sûr, nous sommes conscients que des progrès sont toujours à réaliser pour maîtriser l’impact des activités agricoles sur l’environnement ou le bien-être animal, et nous y œuvrons, mais dans la mesure des possibilités techniques et des nombreuses contraintes qui pèsent déjà sur nos exploitations.

Je suis assez fière de dire que notre réseau a cette force, nous n’attendons pas d’être provoqués pour faire évoluer nos pratiques, et nous mettre autour de la table pour discuter. C’est notamment le travail qui a été réalisé dans le domaine phytosanitaire via le contrat de solutions dont nous sommes partie prenante avec 40 autres organisations. Nous avons déjà pu, en examinant les solutions selon les filières et les territoires, en élargissant le dialogue à de nombreux acteurs afin que chacune des parties prenantes puisse être représentée, mettre en avant des leviers d’action concrets, des voies de progrès réelles, faisables. C’est mieux que des incantations.

Les défis auxquels l’agriculture doit faire face sont nombreux. Les innovations qui doivent nous mobiliser ne concernent pas que les pratiques agricoles. Elles concernent  nos territoires, nos filières. Elles relèvent aussi bien de la préservation des terres agricoles, de l’approvisionnement des cantines ou encore de la sensibilisation des élèves dans les écoles à ces défis.

Nous agriculteurs, ne sommes ni inactifs, ni impuissants. Nous sommes pleinement à l’écoute dans la société quand elle nous parle. Mais pas quand elle nous crie dessus. Nous savons aussi crier !

A bon entendeur,


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